Depuis quatre ans, Yuka guide le consommateur dans le choix de ses produits alimentaires et cosmétiques. Comment ? Avec une application gratuite et bien pensée, utilisée par 25 millions d'utilisateurs dont 16,5 millions en France. Quelle est son évolution ? Quelles relations entretient Yuka avec les marques ? Réponses avec Julie Chapon, co-fondatrice.
Copmment fonctionne Yuka ?
Créée en 2017, l’application mobile Yuka a connu un tel succès auprès des consommateurs souhaitant vérifier la qualité des produits alimentaires transformés disponibles en magasin via leur smartphone qu’elle en a même inspiré un verbe « Yukaiser ». En clair, les consommateurs choisissent un produit après avoir scanné le code-barres l’identifiant. Sa composition est en effet décryptée instantanément par l’application qui le compare avec des produits du même style.
Le consommateur pourra ainsi choisir le produit le plus sain en rayons selon la présence d’ingrédients nocifs ou pas, pour la santé. Ils choisiront ainsi selon la couleur le labelisant, vert étant le meilleur, orange, le notant comme médiocre tandis que la couleur rouge apparaissant dans les résultats de l’application, sonnera le tocsin quant à la présence d’éléments toxiques au sein du produit.
L’application Yuka aide ainsi les consommateurs à choisir le meilleur produit possible selon leurs envies au fil des différents typologies, des boissons à la biscuiterie en passant par les quiches prêtes à emporter en rayon par exemple. Chaque produit comprend en effet une jungle d’ingrédients présentés dans sa composition. Traditionnellement, cette dernière est en effet obligatoirement affichée sur le packaging mais laissera perplexe le consommateur sans bagage scientifique qui plus est chimique.
Outre l’aide apportée au consommateur désireux de privilégier les produits les plus sains, Yuka se présente comme un levier d’action auprès des industriels afin de les inciter à améliorer leur process de fabrication et le choix des composantes de leurs produits.
La notation de Yuka est établie à partir du croisement de trois critères, les données nutritionnelles représentant 60 % du calcul, la présence et la portée sur la santé des additifs concernant 30% de la notation, 10% enfin étant réservé à la part des labels bio.
Yuka, identifier ce qui est sain ou ne l'est pas
Le succès fulgurant de Yuka auprès des consommateurs soucieux de bien manger démontrait déjà des comportements du quotidien axés sur la volonté d’acheter des produits sains, pour l’alimentation mais également pour les cosmétiques.
Les trois fondateurs de l’application mobile Yuka ont ainsi développé en 2018 une version de leur application consacrée aux produits d’hygiène et cosmétiques afin de guider le consommateur dans son choix de produits de lavages, crèmes de beauté etc. De quoi permettre au client de scanner tant les gâteaux pour le goûter des enfants au rayon alimentation que le shampoing familial au sein du rayon hygiène.
Enfin, les trois cofondateurs avec leur équipe de quelque 10 personnes ont internationalisé peu à peu leur application gratuite à partir de 2019, afin de porter la bonne parole autour de la nécessité d’opter pour des produits sains en privilégiant sa santé.
Quatre ans après sa création, nous avons interviewé Julie Chapon, cofondatrice de Yuka, pour voir de quelle manière a évolué l’application Yuka, tant d’un point de vue alimentaire que cosmétique
Un nombre grandissant d'utilisateurs
Selon Julie Chapon, « Yuka a actuellement 25 millions d'utilisateurs à travers 12 pays (France, Belgique, Suisse, Luxembourg, Espagne, Italie, Grande-Bretagne, Irlande, Allemagne, Etats-Unis, Canada et Australie). La majorité de nos users se trouvent néanmoins en France avec 16,5 millions d'utilisateurs » . Pas d’informations cependant sur le portrait en termes de sexe et de tranche d’âge. Et pour cause, « nous ne collectons pas de données personnelles sur nos utilisateurs, je n'ai donc pas d'informations sur l'âge, le sexe, la géolocalisation à vous donner » souligne Julie Chapon. L’équipe Yuka veille ainsi la protection des données de ses utilisateurs En revanche, on constate l’internationalisation de l’application qui démontre combien l’intérêt pour bien consommer n’est pas uniquement réservé aux Français, cette tendance ayant prise de l’ampleur en Europe comme en Amérique du Nord et en Australie, la méfiance vis à vis des produits alimentaires transformés comme des produits de cosmétique étant récurrente dans le monde entier.
Néanmoins, de même, nous ne pourrons obtenir des statistiques précises quant à la répartition de scans de produits entre le secteur alimentaire et le secteur cosmétique. Nous apprendrons en revanche par Julie Chapon que la répartition dans la base de données des produits analysés par Yuka est très largement en faveur des produits alimentaires, ce qui reste assez logique car l’alimentation est le premier secteur originel de l’application en matière d’analyse de produits à sa création. Et la cofondatrice de nous préciser : « au total, sur 2 millions de produits répertoriés dans notre base de données, nous avons 1,5 millions de produits alimentaires et 500 000 produits cosmétiques ».
L’application a un top 10 des produits les recherchés dans sa base, comme nous le décrit Julie Chapon: « Dans le top 10 des produits les plus scannés en France (et c'est assez stable depuis quelques années), on trouve : des pâtes à tartiner au cacao type Nutella/Nociotella/Bonne Maman, de l'eau Cristaline, des biscuits au chocolat pour enfants, du coca-cola rouge et light, mais aussi de la margarine etc». Le top dix des produits en matière de beauté reste plus intrigant : « Côté cosmétique, dans les produits les plus scannés on trouvera principalement des masques pour visage et pour cheveux ».
Yuka, des infos mais aussi des études
En tissant des liens avec ses utilisateurs se manifestant pour commenter leur expérience auprès de l’équipe de Yuka, ces derniers se sont lancé dans la réalisation d’une étude d’impact auprès de plus de 230 000
personnes volontaires qui ont pris le temps de répondre au questionnaire de Yuka. L’équipe a également recueilli le témoignage de 21 industriels de l’alimentaire et de la cosmétique qui ont fait évoluer leurs produits. Le tout en conservant le principe d’indépendance cher à Yuka. 47% des répondants déclarent ainsi utiliser l’application à chaque fois qu’ils font leurs courses. L’utilisation de l’appli gratuite a ainsi incité 94% d’entre eux à changer leur comportement d’achat en arrêtant d’acheter certains produits auparavant privilégiés car juges trop nocifs. 84% des personnes ayant répondu à l’étude déclarent acheter désormais davantage des produits bruts. Surtout côté alimentation 83% des répondants déclarent acheter moins de produits mais de meilleure qualité. Surtout, 57% des utilisateurs interrogés affirment avoir adopté le fait maison en cuisinant davantage.
De leur côté, un certain nombre d’industriels affirme avoir modifié la
Composition de leurs produits suite à l’effet de la note Yuka les concernant.La marque Liebig par exemple a supprimé pour sa gamme PurSoup' les arômes artificiels, l’amidon modifié et du sucre tout en misant sur l’enrichissement en légumes et en réduisant le sel.
Ces changements concrets concernent aussi certains produits cosmétiques telle la suppression du benzylsalicylate dans les sprays et
crèmes solaires de la marque Caudalie.
L’utilisation de l’application gratuite Yuka concourt ainsi peu à peu à une consommation plus avisée en faveur de la santé de la part des utilisateurs mais également d’une prise de conscience de la part de certains industriels afin d’améliorer l’effet de leurs produits sur la santé des utilisateurs. Le succès de Yuka a clairement un effet motivant en termes de retombées de vente en magasin.
La structure à la tête de l’application reste de petite taille mais veille à son indépendance face aux potentielles pressions d’industriels. Elle refuse à cet égard toute publicité, affiche une totale objectivité en matière des évaluations et recommandations de produits. Et doit parfois faire face à des attaques sur le terrain judiciaire qui peuvent affecter son fonctionnement.
Yuka, un succès qui n'est pas sans risque
A contrario, certains lobbys de l’industrie agro alimentaire confrontés aux mauvaises notes de leurs produits sur l’application Yuka, ont choisi d’attaquer la petite structure en justice. Ces démarches judiciaires ayant un coût, Yukla a ouvert ainsi une cagnotte pour appeler à l’aide ses utilisateurs. Une opération que nous avons évoquée dans Homap.
Julie Chapon à cet égard explique l’objectif de cette cagnotte : « il s’agit de nous aider à financer nos frais de défense passés et à venir (frais d’avocats, frais d’huissier, frais administratifs liés aux procédures, conseil juridique, etc.)Jusqu’à ce jour, ces procédures nous ont déjà coûté 223 000€. Difficile d’estimer combien va maintenant nous coûter la suite de ces procédures puisque nous avons fait appel, mais il est certain que cette cagnotte nous permet d’aborder cette période de façon beaucoup plus sereine. S’il se trouve que la cagnotte excède nos frais de défense à l’issue de ces procédures, Yuka a décidé de reverser le différentiel à l’association Ligue contre le cancer. ». Pour l’heure, près de 390 000 euros ont été collectés avec la participation de 20 220 personnes désireux de contribuer à la défense de Yuka contre la pression des lobbys.
La structure à la tête de l’application reste de petite taille mais veille à son indépendance face aux potentielles pressions d’industriels. Elle refuse à cet égard toute publicité, affiche une totale objectivité en matière des évaluations et recommandations de produits. Pour ce faire, Yuka finance ses activités avec trois sources de financement. Une version payante de l’application propose ainsi aux utilisateurs de devenir adhérents premium en bénéficiant de plusieurs fonctionnalités supplémentaires (barre de recherche, mode hors-ligne, alertes personnalisables).
L’équipe a également publié un livre “Le guide de l’alimentation saine”, disponible sur le site mais aussi en librairie. Enfin, les consommateurs soucieux de bien manger pourront toujours aussi acquérir sur le site Yuka, un calendrier des fruits et légumes de saison.
Autant de publications et sources de revenus en adéquation avec le positionnement de la petite application, nous encourageant à mieux consommer et surtout in fine, à privilégier le fait-maison !